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Le jardin de Minerve
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  • Quand la géopolitique et la stratégie militaire sont vues avec les yeux d'une femme... J'ai 20 ans d'expérience professionnelle dans ces domaines et un doctorat sur les conflits asymétriques. Libre utilisation des informations mais citez ce blog.
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2 mars 2019

GUERRE ET TECHNOLOGIE

La Grande Guerre, et plus encore la Deuxième Guerre Mondiale, ont montré l’importance des moyens de communication non seulement pour coordonner les actions militaires sur les différents théâtres d’opérations, mais aussi pour mobiliser le soutien populaire autour de l’effort de guerre à travers des actions d’information et de propagande. Par la suite, au cours de la Guerre Froide et face à la supériorité capacitaire soviétique[1], les Etats-Unis ont misé sur la maîtrise de la gestion de l’information à travers le développement de systèmes de communication interactifs, capables notamment de fusionner et de diffuser les informations en temps quasi réel. Ils ont ainsi bouleversé la nature des conflits et modifié les rapports de force entre les acteurs des relations internationales.

En parallèle, très probablement afin d’éviter l’apocalypse nucléaire, le recours à la metis – c’est-à-dire aux stratagèmes et aux ruses qui permettaient aux différentes polis, les cités grècques, d’utiliser de manière intelligente la situation du moment et ainsi de l’emporter sur des ennemis plus puissants[2] – se généralise à tous les conflits qui ont eu lieu pendant la Guerre Froide. Cette stratégie fondée sur la metis a été qualifiée de plusieurs façons par les historiens contemporains, les experts militaires et les journalistes, comme par exemple : « lutte révolutionnaire » ; « subversion » ; « guerre civile » ; « guérilla » ; « révolution anti-impérialiste » ; « terrorisme » ; « conflits de basse intensité » ; mais aussi « conflits asymétriques »[3].

Au cours des travaux, nous verrons que l’émergence, puis l’explosion des technologies de l’information et de la communication ont joué un rôle essentiel dans l’érosion de la notion de souveraineté nationale et dans l’apparition de nouveaux acteurs sur la scène internationale. Elles ont, en outre, transformé la notion de pouvoir : d’un concept essentiellement matériel et quantifiable ou «capacitaire», il a pris progressivement un aspect plus immatériel et plus dépendant de la capacité d’acquérir et de conserver le soutien de l’opinion publique et des marchés. En même temps, sur un plan militaire, les technologies de l’information et de la communication, au sens commandement du terme, permettent d’acquérir une vision commune du théâtre d’opérations et donc une réactivité et une efficacité accrue des forces face à toute évolution de la situation. En d’autres termes, ces technologies confèrent un avantage dans le temps et dans l’espace sur l’adversaire qui doit permettre d’acquérir et de conserver la liberté d’action et l’initiative stratégique.

Le développement technologique implique une révolution dans les affaires militaires mais également une évolution de l’environnement social, économique et politique.

Aujourd’hui, le pouvoir repose désormais sur un autre pilier que les seules ressources matérielles. Il trouve dans les aspects immatériels liées à la manipulation des informations – rendue de plus en plus facile grâce au développement des technologies de l’information et de la communication – un nouveau champ d’action. La relative nouveauté de cette problématique et ses aspects multiformes nous ont conduit, dans le cadre de cette thèse de doctorat, à étudier le rôle des technologies de l’information et de la communication (TIC) dans le cadre des formes conflictuelles qui opposent des Etas-nations à des organisations non étatiques et qui sont basées sur une stratégie de metis.



[1] L’expression « supériorité capacitaire » fait partie du jargon du ministère français de la Défense. Cette expression signifie qu’un acteur, dans ce cas les Soviétiques, a plus de moyens militaires qu’un autre, les Etat-Unis en l’occurence.

[2] Giovanni Brizzi, Le guerrier de l’antiquité classique. De l’hoplite au légionnaire, Edition du Rocher, Paris, 2004, p. 15.

[3] La partie centrale de cette thèse est dédiée à l’analyse du phénomène « conflits asymétriques ». Pour le moment nous nous sommes limités à introduire ce terme afin de permettre au lecteur de mieux comprendre le cadre général dans lequel s’inscrit l’analyse de cette thèse.

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